Pour répondre aux objectifs physiologiques de la période de tarissement, on distingue 5 implications zootechniques et nutritionnelles :
Garantir le bon fonctionnement de la glande mammaire
Couvrir les besoins énergétiques et protéiques pour l’entretien de la mère et la croissance de son veau
Optimiser la synthèse d’un colostrum de qualité pour la vitalité et la santé du veau
Respecter la spécificité digestive des ruminants
Couvrir et organiser les apports minéraux dans le respect métabolique de l’espèce
La période de pâturage impactera plus ou moins sur ces objectifs zootechniques et il faudra donc veiller à toujours garder le contrôle de la quantité d’herbe (au printemps et à l’automne < 10 ares par vaches taries).
Le pâturage impacte plus ou moins les objectifs zootechniques
Je vais détailler les différentes phases du tarissement en mettant en lien avec les impacts du pâturage
La phase de début de tarissement : adaptez la qualité et quantité d’herbe ingérée
Cette phase doit permettre de couper la production laitière sans engendrer d’infection mammaire. Pour se faire, il sera important d’anticiper la chute des apports énergétiques et protéiques avant l’arrêt des traites. La prairie a ses atouts : l’éloignement et donc la rupture avec le rituel de la traite, la qualité et le confort du logement mais attention à adapter qualité et quantité d’herbe ingérée. Un repère qui servira aussi pour les autres périodes : la consommation de fourrage fibreux.
La phase de plein tarissement : la prairie est adaptée mais toujours en quantité limitée
Le plein tarissement c’est la phase qui s’étale de la 2ème semaine de tarissement à 3 semaines avant le vêlage. C’est probablement à ce moment que la prairie est la mieux adaptée. Si cette phase peut s’apparenter à une période de repos, il ne faut pas pour autant tout laisser faire. Couvrir les besoins ne veut pas dire suralimenter car toute reprise d’état corporel sera un handicap métabolique. Le repère : une consommation minimale de fourrage fibreux de 4 à 5 kg (type paille détassée ou foin de graminées en épi). Protéine, apports minéral et vitaminique impacteront la qualité future du colostrum. S’il n’y a pas de distribution quotidienne, l’utilisation de bolus à diffusion lente peut aider à bien compléter la couverture des besoins.
La phase de préparation au vêlage : attention au calcium et au BACA
C’est pendant cette phase que la gestion en prairie complexifie le plus le respect des objectifs zootechniques. Respecter la spécificité digestive des ruminants, c’est respecter une transition alimentaire pour que la flore microbienne s’adapte à la ration du début de lactation avant le vêlage. Il est donc indispensable que la ration de cette phase soit constituée des ingrédients de la ration future. Les apports énergétiques et protéiques doivent être suffisants et impactent directement la qualité du colostrum mais tout excès sera préjudiciable et pourra entrainer des risques forts d’acétonémie autour du vêlage. Mais ce qui est le plus compliqué avec le pâturage, c’est la gestion du calcium.
Mais du coup, comment gérer le calcium sur la phase de fin de tarissement ?
En faite, il existe 2 stratégies de gestion du calcium :
1- L’approche traditionnelle dite de sous nutrition calcique pour les niveaux de production modérés.
Limiter l’ingestion de calcium : éviter les légumineuses et faire consommer de la fibre type paille induit une carence et augmente les mécanismes hormonaux de mobilisation
> Attention au risque de carence vraie en calcium
2-Le concept BACA* négative (mobilisation des tampons calcique pour neutraliser la baisse du pH sanguin)
Nécessité de bien connaitre tous les ingrédients de la ration : fourrages (légumineuses interdits), concentrés et minéraux
Apport de sels anioniques
> Obligation d’avoir un lot spécifique prépa vêlage et contrôler la durée
> Vérifier les équilibres par la mesure du pH urinaire
Le tarissement à l’herbe est possible et même souhaitable
En conclusion, je dirais que le tarissement à l’herbe est possible et même souhaitable pendant la phase de plein tarissement car l’impact est très fort sur la santé et notamment sur l’appareil locomoteur de la vache laitière. Le niveau de production et la génétique interviennent aussi dans la réflexion. Pour les 2 autres phases, c’est un vrai challenge technique où il est indispensable de rester maître de la qualité et de la quantité de pâturage et adapter la complémentation.
(*) Le concept la BACA négative : Balance anions – cations
BACA = (Na + K) – (Cl + 0,6 S) / kg MS
Pourquoi la calculer?
La BACA a une influence sur le mécanisme de stockage et de mobilisation du calcium
Fin de tarissement: la BACA doit être négative OU proche de 0
- Vêlage facile et vigueur du veau.
- Prévention fièvre de lait et non délivrance (surtout en régime pâture).
- Appétit renforcé en début de lactation. Démarrage rapide et tonique.
En lactation : BACA>200 meq/kg. Augmentation de l’ingestion et du lait.
Comment la calculer?
- L’ensemble des électrolytes portant une charge positive sont appelés les cations (Na+, K+), les anions étant ceux possédant une charge négative (Cl-, S)
- La BACA est calculé en faisant la différence entre les principaux cations (sodium, potassium) et anions (chlore, soufre)